
Carrefours et intersections
Une personne ne peut être réduite à une seule dimension, par exemple «immigrant.e ou non-immigrant.e». Les multiples dimensions sociales qui se croisent et se superposent dans la vie de chacun.e. influencent l’inclusion en emploi de diverses façons. Nous présentons ici quelques-unes de ces dimensions choisies pour leurs impacts sur l’inclusion au travail.
L'âge
L’âge est un facteur important à considérer par rapport à la recherche d’emploi . Par exemple, en moyenne, plus l’on avance en âge, plus la période de recherche d’emploi sera longue. Selon des données de Statistique Canada, en 2019 les Canadiens entre 15 et 24 ans passaient en moyenne 9.5 semaines en recherche d’emploi alors que ceux qui avaient entre 55 et 64 ans passaient en moyenne 24.9 semaines en recherche d’emploi.

Le genre
Des disparités en défaveur des femmes immigrantes sont observées sur le marché du travail, et ce, tant en comparaison aux hommes immigrants qu’aux femmes nées au Canada. Cette situation est particulièrement préoccupante au Québec où les femmes établies depuis moins de 5 ans ont un taux de chômage de 20,5% comparativement à 10,2% pour celles établies ailleurs au Canada. Ce taux est de 9,0% pour les hommes immigrants au Québec. Particulièrement touchées par la surqualification, elles sont plus diplômées que les femmes nées au Québec, mais aussi moins actives sur le marché du travail. Celles qui détiennent un emploi à temps plein gagnent près de 14 000 $ de moins par an que les femmes nées au Québec avec un diplôme comparable.
Le statut d'immigration
Les catégories administratives d’immigration définies par l’État structurent dans une importante mesure l’accès au marché de l’emploi des personnes immigrantes. Les personnes arrivées au Canada avec un statut d’« immigrant économique », parce qu’elles sont sélectionnées notamment en tenant compte de leur potentiel sur le marché de l’emploi, connaissent une insertion généralement plus facile que les personnes admises aux Canada dans le cadre du regroupement familial ou bien en tant que personnes réfugiées.
Le racisme systémique
Même si la discrimination basée sur la couleur de peau, l’ethnicité ou la religion est interdite par la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, avoir la peau blanche, un nom à consonance canadienne-française et se dire catholique (75% de la population du Québec en 2011) confèrent des avantages sur le marché du travail québécois.
C’est parce qu’il exclut de façon disproportionnée les personnes ayant une autre couleur de peau, un nom évoquant un autre groupe ethnique ou s’identifiant à une autre religion que l’on peut dire que le marché du travail participe au racisme systémique. Cela se mesure par des écarts salariaux, de plus hauts taux de chômage, la sous-représentation de ces personnes dans les postes de hautes directions et leur sous-représentation dans les organismes publics.
Cette situation est le résultat d’attitudes empreintes de préjugés et de stéréotypes, mais aussi de pratiques et de politiques adoptées sans prendre en compte les voix des personnes noires, musulmanes, autochtones et autres.
Le temps passé au Canada
Les études qui comparent les revenus des personnes immigrantes avec ceux des personnes natives ou les revenus des personnes immigrantes, selon leur origine nationale, tendent à montrer que les disparités diminuent dans le temps. En fait, c’est après 10 ans que la majeure partie des écarts de revenus disparaît. Cela s’explique par les stratégies qu’adoptent les personnes immigrantes pour contourner les obstacles qu’elles rencontrent. Pour la plupart, cela consiste en un retour aux études, le recours à des organismes en employabilité, la prise de cours de langue, l’acquisition d’expériences québécoises dans un autre domaine, le bénévolat pour se bâtir un réseau, etc.
Pour aller plus loin
NAMULULI, Nsimire, BAGAOUI, Rachid, et HEMEDZO, Komi. Analyse intersectionnelle des défis et enjeux des inégalités sociales sur le marché du travail: l’expérience de vingt femmes congolaises résidant au Québec et en Ontario. Reflets: revue d’intervention sociale et communautaire, 2018, vol. 24, no 1, p. 98-126.
